ENTRE DEUX SAISONS, LE PASSAGE D’UNE JOURNÉE
TEXTO-OBRA Boris Grisot
Jeune artiste issu des plaines de Bourges, je passe le temps à rêver dans les creux des montagnes de Grenoble, mêlant toutes formes, je crée des mythologies poétiques pour honorer le présent et dormir avec la vie.
RESUMO
Cette courte nouvelle vient rejoindre la démarche de la revue Arte ConTexto dans une volonté de s’immiscer dans le care, ou plus profondément dans l’écoute même du temps comme soi-même. Le texte en question fût écrit sans penser les humains par-dessus un monde, mais plutôt comment le monde lui-même raconte un fragment de lui-même intégrant tout dans une notion d’interdépendance donnant lieu à des révélations sur l’espace vivant lui-même. De cette réflexion, est né ce texte.
Revista Arte ConTexto
REFLEXÃO EM ARTE
ISSN 2318-5538
V.7, Nº17, MAR., ANO 2022
TRABALHO EM ARTE E CUIDADO
Sur une plage, deux cueilleurs vont réaliser le don d’une récolte à l’océan.
Sous volute d’herbes grasses
Une missive lunaire s’accorde
Descendant des escaliers
Regard en direction de l’arc de cercle émeraude
« — Où est la barque ?
— Juste un peu plus loin sur la berge, elle attend nos yeux
— … Alors, suivons nos pupilles… Est-ce que tu as les pots avec toi ?
— Sur mon dos, oui… Ils commencent à bouger d’ailleurs
— Prenons notre temps ou nous risquons de les réveiller »
Départ sans bruit sur une rive,
Le grand lac les regarde,
sur la partie du monde qui réside entre nos yeux et nos doigts,
sur cet entrelacs de lumière.
La falaise se remplit de morses en devenir osseux,
les deux personnages côtoient la rizière qui murmure à leurs côtés.
Le buffle lève la tête,
maintient ses mouvements,
une attente qui frétille ;
la tête du buffle glisse comme le nuage et ainsi la rencontre commence.
Sur leurs routes les deux animaux à la parole s’articulent vers la barque sur le sable blanc.
Une mouette signale sa présence par une marque blanche dans l’azur d’un rêve.
« — Pose avec tout ton corps, Khalid, laisse la berge recevoir, ferme tes yeux
— *les yeux fermés* Les pots fondent, Chiharu, mes mains sentent le sable
— Attendons encore, le départ n’est pas encore là
— Ça y est, iels sont en survol, nous pouvons y aller, je dépose le cadeau »
Une partie des gouttes qui s’arrête,
lorsque la barque flotte,
l’eau contemple le reflet de ce qui existe hors du miroir.
Le buffle,
patients pieds dans la boue,
ses yeux, lotus.
La falaise du par-dessus est quant à elle devenue l’arborescence de milliers d’espèces qui saluent de loin.
Sur la plage,
un petit bol rempli de bleuet et de quelques graines de chia parmi une compote de pêche.
Laissé là, nourriture, lien des saisons.
La surface du ciel paraît enneigée.
On entend le ciel s’ouvrir, une pagaie après l’autre, lentement, sans brusquer le rivage, jusqu’au premier sentier marin.
« — Par ici, Khalid, le pot m’oriente, il m’envoie des signaux
— Très bien, Chiharu, reste connecté, je suis entre tes sens »
Pointe noire sous le bateau,
Prenant son temps loin des mouettes, il contemple le récif.
Les phoques d’avant émettent encore leurs cris d’une falaise, haut le cœur
Sur le sable, quelques crabes dégustent les graines laissées là à germer, elles ont déjà changé de couleurs.
La barque comme un souffle, sans arrêt, glissade éternelle, jusqu’à la rupture, le moment qui viendra nouveau comme la braise.
« — Le pot commence à se déformer, Khalid, nous approchons, reste doux avec l’eau
— Oui, je ne brûlerai pas mes mains, Chiharu… j’entends… le pot
— Il arrive… »
Crac crac, son du crâne qui tapote qui donne la cadence,
Faïence qui laisse apparaître ses failles, poudre étrange qui s’écoule, le pot tend à rejoindre le bord de la surface. L’appel de l’eau, le pot manque de peu son reflet, la brillance du fleuve reste constante, les oursins du fond marin s’agitent, ils sont désormais des soleils noir, violet, vert, marron.
« — Magnifique, Khalid…
— Chiharu, regarde l’organe renaît…
— Khalid, laisse le pot rejoindre son clone »
Dans la main, le pot brisé, départ vers les cimes, le bras comme arche.
Le pot se désagrège, le buffle de loin voit les étoiles qui l’habitent prendre forme devant lui.
Deux petites perles de feu, deux petites perles de feu.
Le pot devient nappage de métal sur la surface de l’eau, quelques pétales de trompettes de morts fleurissent sur cette surface de métal.
Les mouettes plongent pour en attraper les nuances.
En suspensions, les deux petites perles de feu,
elles touchent la pointe d’un palmier, rosée d’univers.
ENTRE DEUX SAISONS, LE PASSAGE D’UNE JOURNÉE
TEXTO-OBRA Boris Grisot
Jeune artiste issu des plaines de Bourges, je passe le temps à rêver dans les creux des montagnes de Grenoble, mêlant toutes formes, je crée des mythologies poétiques pour honorer le présent et dormir avec la vie.
Revista Arte ConTexto
REFLEXÃO EM ARTE
ISSN 2318-5538
V.7, Nº17, MAR., ANO 2022
TRABALHO EM ARTE E CUIDADO
RÉSUMÉ
Cette courte nouvelle vient rejoindre la démarche de la revue Arte ConTexto dans une volonté de s’immiscer dans le care, ou plus profondément dans l’écoute même du temps comme soi-même. Le texte en question fût écrit sans penser les humains par-dessus un monde, mais plutôt comment le monde lui-même raconte un fragment de lui-même intégrant tout dans une notion d’interdépendance donnant lieu à des révélations sur l’espace vivant lui-même. De cette réflexion, est né ce texte.
Sur une plage, deux cueilleurs vont réaliser le don d’une récolte à l’océan.
Sous volute d’herbes grasses
Une missive lunaire s’accorde
Descendant des escaliers
Regard en direction de l’arc de cercle émeraude
« — Où est la barque ?
— Juste un peu plus loin sur la berge, elle attend nos yeux
— … Alors, suivons nos pupilles… Est-ce que tu as les pots avec toi ?
— Sur mon dos, oui… Ils commencent à bouger d’ailleurs
— Prenons notre temps ou nous risquons de les réveiller »
Départ sans bruit sur une rive,
Le grand lac les regarde,
sur la partie du monde qui réside entre nos yeux et nos doigts,
sur cet entrelacs de lumière.
La falaise se remplit de morses en devenir osseux,
les deux personnages côtoient la rizière qui murmure à leurs côtés.
Le buffle lève la tête,
maintient ses mouvements,
une attente qui frétille ;
la tête du buffle glisse comme le nuage et ainsi la rencontre commence.
Sur leurs routes les deux animaux à la parole s’articulent vers la barque sur le sable blanc.
Une mouette signale sa présence par une marque blanche dans l’azur d’un rêve.
« — Pose avec tout ton corps, Khalid, laisse la berge recevoir, ferme tes yeux
— *les yeux fermés* Les pots fondent, Chiharu, mes mains sentent le sable
— Attendons encore, le départ n’est pas encore là
— Ça y est, iels sont en survol, nous pouvons y aller, je dépose le cadeau »
Une partie des gouttes qui s’arrête,
lorsque la barque flotte,
l’eau contemple le reflet de ce qui existe hors du miroir.
Le buffle,
patients pieds dans la boue,
ses yeux, lotus.
La falaise du par-dessus est quant à elle devenue l’arborescence de milliers d’espèces qui saluent de loin.
Sur la plage,
un petit bol rempli de bleuet et de quelques graines de chia parmi une compote de pêche.
Laissé là, nourriture, lien des saisons.
La surface du ciel paraît enneigée.
On entend le ciel s’ouvrir, une pagaie après l’autre, lentement, sans brusquer le rivage, jusqu’au premier sentier marin.
« — Par ici, Khalid, le pot m’oriente, il m’envoie des signaux
— Très bien, Chiharu, reste connecté, je suis entre tes sens »
Pointe noire sous le bateau,
Prenant son temps loin des mouettes, il contemple le récif.
Les phoques d’avant émettent encore leurs cris d’une falaise, haut le cœur
Sur le sable, quelques crabes dégustent les graines laissées là à germer, elles ont déjà changé de couleurs.
La barque comme un souffle, sans arrêt, glissade éternelle, jusqu’à la rupture, le moment qui viendra nouveau comme la braise.
« — Le pot commence à se déformer, Khalid, nous approchons, reste doux avec l’eau
— Oui, je ne brûlerai pas mes mains, Chiharu… j’entends… le pot
— Il arrive… »
Crac crac, son du crâne qui tapote qui donne la cadence,
Faïence qui laisse apparaître ses failles, poudre étrange qui s’écoule, le pot tend à rejoindre le bord de la surface. L’appel de l’eau, le pot manque de peu son reflet, la brillance du fleuve reste constante, les oursins du fond marin s’agitent, ils sont désormais des soleils noir, violet, vert, marron.
« — Magnifique, Khalid…
— Chiharu, regarde l’organe renaît…
— Khalid, laisse le pot rejoindre son clone »
Dans la main, le pot brisé, départ vers les cimes, le bras comme arche.
Le pot se désagrège, le buffle de loin voit les étoiles qui l’habitent prendre forme devant lui.
Deux petites perles de feu, deux petites perles de feu.
Le pot devient nappage de métal sur la surface de l’eau, quelques pétales de trompettes de morts fleurissent sur cette surface de métal.
Les mouettes plongent pour en attraper les nuances.
En suspensions, les deux petites perles de feu,
elles touchent la pointe d’un palmier, rosée d’univers.
Lista de Imagens
1 Boris Grisot, Porte dérobée, Un temple en feu, 2021, Collage numérique de photographie argentique, 100 x 70 cm, divers lieux, dont le Palais du facteur cheval.
2 Boris Grisot, La vague bleue de Soleil, 2021, Photographie argentique, 100 x 69 cm, voyage au sud de La France.
Lista de Imagens
1 Boris Grisot, Porte dérobée, Un temple en feu, 2021, Collage numérique de photographie argentique, 100 x 70 cm, divers lieux, dont le Palais du facteur cheval.
2 Boris Grisot, La vague bleue de Soleil, 2021, Photographie argentique, 100 x 69 cm, voyage au sud de La France.